Avec Marion la France a-t-elle trouvé sa nouvelle Jeanne d’Arc ?

Neuf mois après avoir quitté brusquement l’arène politique, Marion Maréchal Le Pen fait à nouveau parler d’elle. Son discours prononcé à Washington devant l’American conservative union (conférence d’action politique conservatrice) sème la panique et suscite bien des commentaires sur son retour éventuel.

Pendant dix minutes, une bouffée d’air frais et tonique a soufflé sur ce forum qui réunit chaque année les leaders conservateurs américains. Rayonnante de beauté et d’intelligence, la blonde Marion a fait entendre à ses auditeurs une musique nouvelle. Un message sans langue de bois auxquels ils ne s’attendaient pas.

Aux Etats-Unis, comme l’a expliqué d’ailleurs Matt Schlapp, président du CPAC, la famille Le Pen n’a pas bonne réputation. A tort ou à raison outre-Atlantique lepénisme rime plus avec étatisme et socialisme qu’avec libéralisme et patriotisme. Et c’est parce que nombreux sont ceux qui, depuis des années, lui conseillaient d’inviter l’ex-députée du Vaucluse que Matt Schlapp a finalement accepté de la rencontrer et de l’inviter à ce grand forum de la droite américaine.

Du coup il lui a réservé une place de choix, puisque Marion a été le deuxième orateur à s’exprimer, juste derrière le vice-président Mike Pence. Un honneur insigne qu’aucun homme(ou femme) politique français n’avait eu avant elle. L’assistance n’a pas été déçue par les propos revigorants qu’elle a tenus. S’inscrivant dans la lignée de Donald Trump et de son « America First », la jeune femme a lancé : « Comme vous je veux retrouver mon pays ! Je suis venue vous dire qu’il y a aujourd’hui une jeunesse prête pour cette bataille en Europe ! Une jeunesse qui croit au dur labeur, qui croit que ses drapeaux signifient quelque chose, qui veut défendre les libertés individuelles et la propriété privée ». Des paroles accueillies par les tonnerres d’applaudissements d’une salle conquise par l’ardeur et la foi en l’avenir de la jeune oratrice.

Contre-société islamiste

Du haut de cette tribune, Marion ne s’adressait pas seulement à cette prestigieuse assemblée d’élus conservateurs. Au-delà, la gracieuse jeune femme envoyait un message pour la France, mais aussi pour toute la jeunesse des nations européennes dont elle se faisait la porte-parole. « Ce que je veux c’est la survie de ma nation, souligna-t-elle, être capable de transmettre non seulement mon héritage matériel, mais aussi mon patrimoine immatériel ». Dénonçant le développement d’une contre-société islamiste en France elle s’écria : « Aprés 40 ans d’immigration massive, de lobbyisme islamique et de politiquement correct, la France est en train de passer de fille aînée de l’Eglise à petite nièce de l’islam ».

Son intervention musclée a bien évidemment provoqué des réactions et suscité des commentaires chez les politiques. Florian Philippot qui n’a jamais eu d’atome crochu avec Marion s’est contenté de souligner qu’elle n’avait pas prononcé « le terme frexit ». Au Front national on a feint de minimiser la portée de l’événement craignant, sans trop y croire, à un retour de l’enfant prodigue. Car Marion Maréchal Le Pen dépasse désormais Marine dans les sondages et reste très populaire auprès des militants. La députée socialiste Karine Berger qui avait vu dans le retrait soudain de l’ex benjamine de l’assemblée nationale « un calcul démoniaque », rien de moins, supputant qu’elle se préparait pour les échéances présidentielles futures aurait-elle raison?

Nul ne peut dire aujourd’hui ce que sera la situation de notre pays dans quatre ans. En annonçant son retrait de la vie politique en mai 2017, l’ex députée FN du Vaucluse avait déclaré qu’elle voulait s’investir dans le privé. On sait désormais qu’elle travaille « à la création d’une académie de sciences politiques » à côté d’autres activités professionnelles. Car son projet est politique. « Nous souhaitons être le terreau dans lequel tous les courants de la droite pourront se retrouver et s’épanouir » a-t-elle affirmé à l’hebdomadaire Valeurs actuelles (22/02/18). Un projet consensuel qui ne devrait pas laisser indifférents les fidèles de Philippe de Villiers, les partisans de Nicolas Dupont-Aignan, comme les amis de Laurent Wauquiez.

S’inspirant de la théorie du philosophe marxiste italien Gramsci qui prône « la bataille de l’hégémonie culturelle comme préalable à la victoire politique » elle explique que la mission de cette école sera de « détecter et former les dirigeants de demain » qui « auront le courage, l’intelligence, le discernement et les compétences pour agir efficacement dans la société et au service de la société ».

Un projet global, un travail de longue haleine, bien loin des préoccupations électorales des partis politiques et de leurs petites combines. Précisant sa pensée pour son auditoire américain, l’ex députée du Vaucluse a déclaré : « Notre combat ne doit pas être seulement électoral : nous devons diffuser nos idées dans les médias, la culture et l’éducation afin de mettre fin à la domination des libéraux et des socialistes ».

Former les élites politiques de demain

A 28 ans, Marion a tout l’avenir devant elle. Son expérience de l’assemblée nationale lui a montré les limites de son mandat de député, ainsi que de sa liberté d’action au sein de son parti. Elle en a tiré les leçons en renonçant, à la surprise générale, à se représenter. « C’est de la désertion ! » avait lancé Jean-Marie Le Pen en apprenant la nouvelle. Refusant désormais de s’enfermer dans un parti politique, la jeune femme privilégie le long terme sur le court terme. S’occuper de former les élites politiques de demain lui parait plus important que d’occuper un siège à l’assemblée nationale. C’est son choix, c’est aussi un pari qu’elle fait sur l’avenir.

Robert Ménard tout en comprenant ses motivations et sa démarche se veut plus pragmatique. Pour le maire de Béziers « qu’on ait des envies de métapolitique et de bataille culturelle à la Gramsci, c’est bien. Mais on a aussi des devoirs. La France exige d’autres engagements. Les gens qui ont des problèmes concrets attendent des réactions urgentes ». En politique, comme en médecine il y a les urgences et les soins de longue durée. Pas facile de concilier le cœur et la raison. Faisons confiance à Marion qui a une tête bien faite et beaucoup de vaillance pour y arriver. Elle a, comme Jeanne la Pucelle, une foi chevillée au corps. Quel plus bel hommage rendre à la seconde patronne de la France après la Vierge Marie que de citer l’historien Jules Michelet dans le remarquable ouvrage qu’il consacra à Jeanne d’Arc en 1853 : « Souvenons-nous toujours, Français, que la patrie chez nous, est née du cœur d’une femme, de sa tendresse, de ses larmes, du sang qu’elle a donné pour nous ». Aujourd’hui l’ennemi à bouter hors de France n’est plus l’Anglais, mais c’est l’islam.