Bruxelles veut privatiser nos barrages !

Une fois de plus Bruxelles met le nez dans nos affaires. La commission européenne a adressé fin octobre une mise en demeure à la France afin qu’elle lance, sans délais, la procédure pour la mise en concurrence des concessions hydroélectriques. L’Europe exige, ni plus ni moins, la privatisation des barrages construits et financés depuis la dernière guerre par l’argent du contribuable.

La demande de Bruxelles n’est pas nouvelle. En juillet 2008, Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’écologie, avait signé le décret de mise en concurrence des concessions des barrages hydroélectriques français.

EDF a toujours bénéficié d’un droit de préférence sur le renouvellement des concessions. Mais l’opérateur s’est transformé en société anonyme(SA) en 2004. Et en 2006, sous la pression de Bruxelles, l’assemblée nationale a dû voter un amendement abrogeant ce droit de préférence. Ainsi, selon la volonté de la commission européenne, le renouvellement des concessions était-il ouvert à la concurrence « libre et non faussée ».

EDF premier producteur européen d’électricité

Les premiers appels d’offres pour le renouvellement des concessions auraient dû être lancés fin 2010. Mais la France a trainé les pieds sur ce dossier. EDF qui exploite la plupart des barrages hydroélectriques (voir encadré ci-après) – ce qui en fait le premier producteur d’électricité d’origine hydraulique de l’Union européenne – s’oppose à cette privatisation. Alors la commission européenne a brandi l’article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Europe : « Les Etats membres sont tenus de veiller, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, à n’édicter et à ne maintenir aucune mesure contraire aux règles des traités et notamment aux règles de concurrence ».

Loi de transition énergétique

Ségolène Royal s’efforce de convaincre la commission européenne que la France respecte bien ses obligations. Elle s’appuie sur la loi de transition énergétique promulguée en août dernier prévoyant que les concessions puissent être placées dans le giron de Sociétés d’économie mixte(SEM) associant le capital public et privé.

Du côté de l’EDF, c’est un non catégorique : « Lorsque ces concessions viendront en renouvellement nous répondrons et nous ferons le maximum pour les garder » martèle Antoine Cahuzac , directeur exécutif du pôle énergies renouvelables à EDF.

Ces arguments suffiront-ils à convaincre les technocrates de la commission européenne qui n’ont que faire des états d’âme de la France lorsque l’on touche à son patrimoine énergétique et historique ? On ne devrait pas tarder à le savoir. Les premiers appels d’offres pour sélectionner les actionnaires devraient être lancés cette année. Bruxelles maintient sa pression en laissant planer le doute sur une éventuelle exclusion d’EDF des appels d’offres. Un comble !



La France possède 399 barrages

85% d’entre eux sont exploités par EDF, 12% par Engie (ex GDF-Suez) via ses filiales Compagnie nationale du Rhône(CNR) et Société hydro-électrique du Midi(SHEM). Le reste étant entre les mains de petits exploitants privés. L’hydraulique représente 12% de la production totale d’électricité en France. L’hydroélectricité ne participe pas à l’augmentation de l’effet de serre, ni à la pollution de l’air en n’émettant ni CO2, ni gaz polluants.