L’effondrement de la pensée politique vraie menace pour la démocratie

« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ». Voltaire a laissé à la postérité cette citation qu’il est indispensable de rappeler alors que les esprits ont tendance à s’échauffer en ce début de campagne pour l’élection présidentielle.

Déclarer publiquement que Charles Pasqua aurait « filé une balle dans la tête » d’Eric Zemmour ne grandit pas Jean-Christophe Lagarde. Le patron de l’UDI a eu beau s’excuser à la suite du tollé suscité par ce langage de voyou, cela ne retire rien à la gravité du propos. Il est la marque d’une intolérance vis-à-vis d’un discours qui pour être non-conformiste n’en traduit pas moins une réalité que certains politiques refusent de voir.

Comment accepter que le ministre de la justice, Eric Dupont-Moretti qualifie avec mépris Cnews de « chaine d’Eric Zemmour et de Marine Le Pen » et dénonce nommément ses animateurs et chroniqueurs pour expliquer son refus de répondre à l’invitation de cette chaine de télévision ? L’ancien « ténor du barreau » redoute-t-il le débat d’idées ? Craint-il de se retrouver confronté au réel, lui qui estimait, on s’en souvient, qu’il n’y avait pas d’insécurité en France mais qu’il existait seulement un « sentiment » d’insécurité ?

Rester enfermé dans ses certitudes c’est renoncer à confronter ses idées à d’autres que les siennes. C’est croire que l’on détient, seul, la vérité et que les contradicteurs sont nécessairement dans l’erreur. C’est se voiler la face, vivre dans le déni, refuser de reconnaître son aveuglement. Tout le contraire de ce que devrait être un ministre de la République !

La pensée unique a fait son temps. Le politiquement correct à vécu, n’en déplaise à ceux qui en étaient les zélés défenseurs. Eric Zemmour a eu le courage, car il en faut, de poser sur la table des dossiers soigneusement enfermés dans les tiroirs. Des dossiers considérés comme explosifs par les gouvernants qui depuis des décennies, par lâcheté, se refusaient à en parler, pour ne pas exaspérer et enflammer les cités.

Pression de l’opinion

Cette religion du « surtout pas de vague » qui a touché non seulement l’Education nationale, mais aussi la quasi-totalité de la fonction publique n’a pas résisté à la pression de l’opinion. C’est désormais tous les candidats à la magistrature suprême qui vont devoir se positionner sur les questions de sécurité, d’immigration, de communautarisme, mais aussi d’identité et de laïcité comme on l’a vu lors des débats des Républicains.

Des sujets considérés il y a peu encore comme tabous sont débattus sur les plateaux de télévision. Ceux qui les abordent ne risquent plus d’être excommuniés, qualifiés d’extrémistes de droite, voire de fascistes par les gardiens de l’orthodoxie politico-médiatique. Les censeurs se font aujourd’hui plus discrets. Il est vrai qu’ils ont beaucoup perdu en influence.
Cette libération de la parole confisquée trop longtemps par l’intelligentsia est une bonne nouvelle pour la démocratie dans notre pays qui va reprendre des couleurs.

Il ne faut, néanmoins, pas se réjouir trop vite. Cette mode du « wokisme » et de la « cancel culture », ou culture de l’annulation, dont nous avons dénoncé les ravages à l’Université (cf article du 16 /11/2021) est une nouvelle menace pour notre identité, notre culture, voire notre civilisation.
Version moderne de la pensée unique, elle tend, selon la définition qu’en donne Wikipedia, à dénoncer « publiquement en vue de leur ostracisation des individus, groupes ou institutions, responsables d’actes, de comportements ou de propos perçus comme inadmissibles ». Un sectarisme que Rama Yade, qui fut secrétaire d’Etat sous la présidence de Nicolas Sarkozy assume parfaitement en déclarant qu’elle se sentait agressée lorsqu’elle passait à Paris devant la statue de Colbert.  Une déclaration qui a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux, et que Jean-Michel Blanquer à qualifiée d’ « affligeante ». L’ex-ministre d’origine sénégalaise qui vit depuis trois ans à Washington définit le wokisme comme « un noble combat de justice et de revendication d’égalité dont devrait s’enorgueillir la patrie des droits de l’Homme ». Un discours racialiste plus que choquant pour celle qui, arrivée en France à l’âge de huit ans est un pur produit de la méritocratie républicaine. « La gratitude est la mémoire du coeur » dit un proverbe. Rama Yade l’a sans doute oublié !