Macron peut perdre les régionales mais remporter la présidentielle

Contrairement à ce que croient certains, une défaite de son parti aux régionales n’empêcherait pas Macron d’être réélu l’an prochain à la présidence de la République.Les élections régionales des 20 et 27 juin vont revêtir une importance toute particulière. Ses résultats seront regardés à la loupe par les états-majors des partis politiques. A un an de l’élection présidentielle elles donneront une image réelle de la situation politique. Surtout elles permettront aux candidats potentiels de la droite de se positionner dans la course à l’Elysée.

Qui, de Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, ou Laurent Wauquiez, candidats à la réélection à la tête de leurs régions respectives, représentera la droite ? Et s’ils sont réélus, comme semblent l’indiquer les sondages, comment les départager puisqu’aucun candidat naturel ne s’impose ? Faudra-t-il organiser des primaires à l’automne comme en 2016 ? La compétition sera-t-elle ouverte aux seuls militants LR, aux sympathisants ou à tous les Français ? Autant de questions qui préoccupent les responsables politiques de la rue de Vaugirard inquiets des conséquences d’une lutte fratricide.

Pour l’heure, seul Xavier Bertrand s’est déclaré candidat. Le président des Hauts-de-France a d’ailleurs lié sa destinée présidentielle à une victoire aux régionales de 2021. « Si je suis battu, j’arrête la vie politique » a-t-il averti dans une posture très gaullienne. Difficile d’imaginer qu’il accepte de se soumettre à une primaire !

A l’Elysée la candidature de Xavier Bertrand est surveillée de près. L’ancien ministre de la Santé de Nicolas Sarkozy serait un adversaire redoutable pour Emmanuel Macron qui a dépêché cinq de ses ministres dont le garde des Sceaux, Eric Dupont-Moretti pour tenter de le torpiller.
En vain jusqu’à présent. Xavier Bertrand fait la course en tête dans les Hauts-de-France, talonné par le Rassemblement national, mais loin devant la liste de la République en marche.

Les stratèges élyséens se méfient tout autant de Valérie Pécresse. La présidente de la région Ile-de-France (ex-LR) apparaît comme une concurrente à prendre au sérieux. Non seulement elle a mené une action reconnue par tous à la tête de la première des régions françaises, mais son positionnement politique lui vaut la sympathie d’une partie de l’électorat macroniste. Raison pour laquelle pas moins de cinq ministres lui ont été envoyés pour lui mordre les molets. Sans grand résultat d’ailleurs puisque Valérie Pécresse est donnée largement en tête dans les sondages.

Psychodrame à la sauce marseillaise

Si l’on ajoute à cela le psychodrame à la sauce marseillaise de la région Paca avec le vrai-faux retrait de la liste Lrem au profit du président sortant (LR) Renaud Muselier orchestré par le Premier ministre Jean Castex on peut s’interroger sur la stratégie élyséenne. « Je ne comprends pas le raisonnement qui consiste à envoyer cinq ministres contre Xavier Bertrand et cinq contre Valérie Pécresse. Dans les deux cas cela ne fonctionnera pas, au risque de montrer que les ministres n’ont aucun poids politique et de paver le chemin d’un candidat de droite vers l’Elysée » analyse Alain Minc. L’essayiste réputé pour être un proche du président et qui souhaite sa réélection estime que ces erreurs tactiques pourraient conduire Emmanuel Macron à la défaite en 2022. Rien n’est pourtant moins sûr !

S’il est difficilement compréhensible que Macron ait fait de ce scrutin un enjeu national alors que le parti du président est menacé de subir une lourde défaite aux élections régionales, il serait tout aussi absurde de penser que la présidentielle est pliée. Certes, Macron a la hantise d’arriver en troisième position – comme Jospin en 2002 – à l’issue du premier tour qui avait vu la qualification de Jean-Marie Le Pen. Il va donc tout faire pour éviter ce scénario catastrophe qui l’éliminerait de la course à l’Elysée. Après avoir fait voler en éclats la gauche en 2017, Macron poursuit la recomposition politique en attirant à lui une frange de l’électorat située à droite qu’incarnent au gouvernement des personnalités comme Gérald Darmanin ou Bruno Le Maire.

Des Françaises et des Français qui ne se reconnaissent plus dans leur pays soumis à une immigration incontrôlée et à une insécurité grandissante et qui réclament des mesures énergiques. Des Français déboussolés par l’éclatement d’une droite orpheline depuis la défaite de Nicolas Sarkozy en 2012 et qui faute de leader et de programme est à la dérive. Macron, en cette fin de quinquennat, va donc caresser dans le sens du poil cet électorat de la droite modérée. Car, il en est convaincu, c’est en attirant à lui ces électeurs attachés à l’Europe et à un certain libéralisme politique qu’il compte faire la différence avec Marine Le Pen.
L’électorat s’est droitisé depuis une quinzaine d’années. Macron a suivi le mouvement. Plus question de laisser au Rassemblement national le monopole des questions sécuritaires. Les Français réclament plus de fermeté de la part de l’Etat ! Il est bien d’accord avec eux. Les policiers se rassemblent devant l’Assemblée nationale pour demander à la justice une plus grande sévérité à l’égard des délinquants, non seulement il soutient leurs revendications, mais il envoie son ministre de l’Intérieur au milieu des manifestants. Absolument sidérant ! Macron est entré en campagne. Avec lui, on n’est pas encore au bout de nos surprises !