Ainsi Benalla disposait-il d’un appartement ultra-sécurisé à Issy-les-Moulineaux, à l’intérieur duquel se trouvait un coffre-fort. Coffre-fort qui a mystérieusement disparu lorsque les enquêteurs sont venus procéder à une perquisition.
Quand les policiers se sont rendus dans la soirée du 20 juillet au domicile de l’ancien garde du corps de Macron, ils ont trouvé porte close. Benalla qui les accompagnait n’avait, parait-il, pas les clefs sur lui. Il expliqua que c’est sa compagne Myriam qui les détenait. Tout en refusant de dire où la jeune femme – qu’il devait épouser le lendemain – se trouvait, et de donner ses coordonnées à la police. « Elle est certainement partie à l’étranger se reposer et fuir les journalistes avec notre bébé » leur déclara-t-il en guise d’explication. Les enquêteurs n’en furent pas surpris. Depuis le début de son audition, ils avaient constaté le « manque de coopération » de l’homme qu’ils avaient en garde à vue. Il n’y avait donc pas d’autre solution que de forcer la serrure. En vain ! La porte dotée d’un système de sécurité sophistiqué résista à tous les assauts.
Après avoir apposé les scellés sur la porte du logement les policiers décidèrent de revenir le lendemain dés 6h du matin accompagnés d’un serrurier et du matériel adéquat pour effectuer leur perquisition. A leur grand étonnement le coffre-fort s’était bizarrement volatilisé durant la nuit. Sans se démonter Benalla expliqua : « Le 19 juillet ma femme m’a appelé pour me dire qu’il y avait plein de journalistes devant la maison et dans le couloir. J’ai demandé à un ami d’aller chercher ma femme et de récupérer tout ce qui pouvait être volé, des objets de valeur et notamment des armes ».
Un témoin capital
Décidément cette femme de 32 ans devenait un témoin capital dans cette mystérieuse affaire. Pour la retrouver les enquêteurs de la brigade de répression de la délinquance à la personne (BRDP) décident d’employer les grands moyens. Comme pour les affaires criminelles, ils vont consulter tous les fichiers de police, effectuer des réquisitions bancaires, tenter d’identifier son véhicule, rechercher d’éventuels PV pour excès de vitesse, vérifier tous les vols au départ des aéroports parisiens. Finalement ils finissent par retrouver sa trace grâce à la géolocalisation dans le 16e arrondissement de Paris.
La jeune femme a beaucoup utilisé son téléphone portable, sans doute pour faire annuler les formalités de son mariage, mais pas seulement. Les enquêteurs ont donc la confirmation qu’elle n’a pas quitté la France. Mais où se trouve-t-elle ? Par le biais de son adresse mail obtenue grâce à la mairie d’Issy-les-Moulineaux ils tentent de la contacter. En vain ! Benalla s’inquiète. Lors de son audition il dénonce ce qu’il considère comme un acharnement de la police : « Je m’interroge sur l’opportunité de faire des recherches sur une femme qui n’a rien à voir dans toute cette histoire. Elle est déjà assez chamboulée ! » dit-il. La faute à qui ? Volontairement ou pas Myriam est devenue la complice de Benalla. Elle est en fuite, recherchée comme une criminelle. Toutes les polices sont à ses trousses. Mais elle reste pour l’heure introuvable !
Curieusement, les armes – trois pistolets automatiques et un revolver Remington – qui étaient enfermées dans le fameux coffre-fort vont réapparaître. Benalla qui les détenait légalement, dit-on, les remettra lui-même aux enquêteurs. Ce n’est pourtant pas vraiment ce qui les intéressait le plus à l’intérieur de cette armoire blindée. Ils s’attendaient à y trouver des documents plus ou moins confidentiels. Et pourquoi pas un plan de réorganisation de la sécurité présidentielle. Voire l’organigramme d’un cabinet noir qui aurait été dirigé par un certain « lieutenant-colonel » Benalla.
Véto du parquet de Paris
Complotisme ? Qu’on nous explique alors pourquoi le parquet de Paris a opposé une fin de non-recevoir à un syndicat de police qui s’est porté partie civile et qui a demandé le 30 juillet, un réquisitoire supplétif aux juges d’instruction pour étendre l’enquête à la disparition du coffre-fort. Le véto du parquet est significatif. Le pouvoir ne veut pas savoir. Ou plus exactement il ne veut pas que les Français sachent ce qui se tramait dans les recoins secrets de l’Elysée. L’avocat du syndicat de police, cité par le Parisien, n’est pas dupe : « Le parquet fait preuve d’une naïveté inhabituelle. Sa position abonde en tout cas la thèse d’un Benalla protégé par le pouvoir ». Ce dont personne ne doute aujourd’hui. Et l’on voudrait nous faire croire qu’il ne s’agit pas d’une affaire d’Etat !
Comme on est loin du fait divers initial où un conseiller du président au sang un peu chaud s’était mêlé au service d’ordre pour jouer les gros bras lors de la manifestation parisienne du 1er mai. Car c’est aujourd’hui le pouvoir Macronien qui est mis en cause. En quelques semaines l’affaire Benalla est devenue l’affaire Macron. « Il n’y a qu’un seul responsable, c’est moi ! » avait-il crânement lancé devant l’auditoire de ses partisans. Eh bien s’il prend la responsabilité de tout ce qui s’est passé, il faut qu’il aille jusqu’au bout et dise la vérité, toute la vérité, aux Français qui le regardent aujourd’hui d’un œil différent comme le montrent le sondage publié le 26 août par le JDD où sa popularité a chuté de 5 points à 39 % de bonnes opinions. Son score le plus bas depuis le début de son quinquennat.
Fini le temps où il était le chouchou des médias et faisait la couverture des magazines. Il n’est pas inintéressant d’ailleurs de noter que c’est Le Monde qui a sorti l’affaire Benalla, pas Le Canard enchainé ou Médiapart. Est-ce le signe que Macron est lâché par l’oligarchie comme certains le croient ? L’avenir nous le dira !
Quoi qu’il en soit l’affaire n’est pas terminée. Elle suit son cours sur le plan judiciaire en dépit de la mauvaise volonté évidente de la Chancellerie. La commission d’enquête parlementaire du Sénat va reprendre prochainement ses travaux. Elle devrait auditionner Alexandre Benalla qui s’est déclaré prêt à être entendu. Réservera-t-il aux sénateurs des révélations ? Il n’est pas interdit de le penser depuis que l’ancien «homme de l’ombre» prend visiblement du plaisir à se retrouver en pleine lumière.