L’hypothèse n’a rien d’impossible ! Les deux candidats du camp national n’ont plus que quelques jours pour trouver les parrainages qui leur manquent pour participer à l’élection présidentielle.
La loi des cinq cents signatures d’élus avait pour but d’empêcher les candidatures farfelues, c’est tout le contraire qui se produit aujourd’hui. Trois des principaux candidats Marine Le Pen, Eric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon tous donnés à plus de 10% par les sondages risquent d’être éliminés de la course à l’Elysée faute d’avoir pu réunir les précieux parrainages. Ce serait « démocratiquement impossible » s’indigne Eric Woerth, le député RL qui vient de faire allégeance à Macron. Il n’empêche qu’en dépit des efforts déployés par les candidats pour convaincre les maires qu’un parrainage n’est pas un soutien, ceux-ci font la sourde oreille. Elus de communes rurales pour la plupart, ils craignent un retour de bâton de leurs administrés, mais redoutent surtout d’être privés des aides du département pour réaliser leurs équipements et du soutien de l’Etat dont ils sont tout aussi dépendants pour boucler leur budget.
Lorsqu’ils sont sollicités, ces maires sous pression préférent donner leur parrainage à un « petit » candidat plutôt qu’à celui ou celle qui pourrait se retrouver en finale. Car la réforme de 2016, voulue par Hollande, a aggravé l’aspect profondément antidémocratique du système. Désormais c’est la totalité des parrainages de chaque candidat qui paraît au Journal officiel et non plus des noms tirés au sort sur la liste. Au prétexte de jouer la « transparence » la réforme a eu pour effet de mettre la pression sur les élus et de donner un sérieux coup de pouce au président sortant. Comme avancée démocratique on aurait pu faire mieux !
Si par malheur la droite nationale qui représente plus de 30% de l’électorat n’était pas représentée à la présidentielle les conséquences seraient catastrophiques pour notre pays déjà profondément divisé. En premier lieu, l’abstention déjà prévisible du fait du manque de « gabarit » (dixit Jean-Marie Le Pen) de la plupart des candidats, serait encore plus massive que lors des précédentes élections. Quant à ceux qui se déplaceraient, ce serait pour mettre dans l’urne un bulletin blanc ou une enveloppe vide. Il est aussi hautement probable que beaucoup attendraient le second tour pour voter pour le candidat opposé à Macron. Le reflexe « Tout sauf Macron » jouerait ainsi à fond.
Mouvements de colère
Si malgré tout le président sortant l’emportait qu’elle serait sa légitimité ? Un pareil scandale démocratique aurait nécessairement de graves répercussions tant sur le plan national qu’au niveau international. Ces élections faussées provoqueraient inévitablement des mouvements de colère. De graves troubles éclateraient dans le pays qui vit sous tension permanente depuis des années. Par ailleurs, un président aussi mal élu n’aurait aucun poids sur la scène internationale. La France, toujours prompte à donner des leçons de démocratie, deviendrait la risée du monde. Sa voix ne compterait pas plus que celle d’une république bananière.
François Bayrou a bien compris le danger. Pour tenter d’éviter ce scénario catastrophique pour une démocratie, le président du Modem a proposé de mettre en place une « banque de parrainages ». Son but : permettre aux candidats en difficulté d’obtenir les cinq cents signatures d’élus nécessaires à la validation de leur candidature. Une initiative démocratique qui démontre, s’il en était besoin, l’absurdité d’un système de sélection totalement dévoyé qu’il faudra réformer en profondeur.
Du côté de La République en marche aussi on semble avoir pris conscience de la gravité du problème. « Je me battrai pour qu’Eric Zemmour soit candidat » déclarait le 16 février sur France Info Jacques Maire, député LREM des Hauts-de-Seine.
Sursaut démocratique ou calcul politique ? Quoi qu’il en soit, aucun des candidats ne refusera des parrainages d’où qu’ils viennent. Ainsi David Lisnard, maire (LR) de Cannes et président de l’association des maires de France vient-il d’accorder son parrainage à la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Un acte hautement symbolique destiné à faire boule de neige. Mais sera-t-il suivi ? Les candidats n’ont plus que quelques jours pour faire leur moisson de parrainages. Ceux-ci devront être envoyés le 4 mars au plus tard au Conseil constitutionnel.
Une chose est certaine, à quelques jours de l’échéance personne n’est en mesure de donner les noms des adversaires du second tour. Le suspense va durer jusqu’au bout. Décidément la présidentielle de 2022 est pleine d’imprévus. L’irruption sur la scène politique du journaliste Eric Zemmour aura rebattu les cartes d’une élection qui paraissait écrite d’avance avec une finale Macron-Le Pen. Un scénario dont les Français ne voulaient pas ! Pourront-ils l’éviter ? Ils auront à se prononcer le 10 avril prochain.