On en parle depuis longtemps comme d’un graal inaccessible. L’implosion du paysage politique consécutif à l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République va-t-elle aider à une recomposition de la droite?
Selon un récent sondage 30% des Français se disent de droite et 11% d’extrême droite. Jamais l’électorat n’aura autant penché à droite. Et pourtant, force est de constater que ses idées ont du mal à s’imposer au plan politique. Pourquoi ?
D’abord il faudrait s’entendre sur ce qui distingue l’électeur de droite de celui de gauche. Pour Christian Vanneste, ancien député (UMP), président du laboratoire d’idées « La droite libre », la réponse tient en trois mots : patriotisme, conservatisme, libéralisme. Est-ce suffisant pour caractériser la sensibilité « de droite » ? Sans doute pas ! Car des clivages opposent, au sein même des partis composant la droite, les partisans de l’indépendance de la France à ceux qui ne voient l’avenir qu’à travers le renforcement des liens avec l’Europe. Ceux qui réclament le rétablissement des frontières aux partisans de la libre-circulation.
Sur le plan sociétal quoi de commun entre les défenseurs de la famille traditionnelle et ceux qui après avoir entériné le mariage homosexuel ne s’opposeront pas demain à la PMA ? Autant de sujets de réflexion pour les responsables politiques des deux grands partis qui représentent aujourd’hui la droite : Les Républicains et le Front national.
« L’Union des droites, ce n’est pas possible. C’est un rêve ! Il y a une différence de nature entre les dirigeants des Républicains et nous » déclarait Marine Le Pen au Monde en septembre 2016. Un an plus tard et après deux défaites consécutives aux présidentielles et aux législatives, la présidente du Front national assure au micro de Jean-Jacques Bourdin (RMC-BFM TV) : « L’union de la droite est une trop petite ambition. Il faut réunir l’ensemble de ceux qui considèrent que la droite doit vivre ».
Nicolas Dupont-Aignan(DLF) ne dit pas autre chose. Lui aussi veut « réunir l’ensemble des droites », soutenu en cela par Jean-Frédéric Poisson(PCD) qui se « contrefiche totalement de la recomposition des droites, de la réunification des droites et de l’union des droites » car pour lui « seul compte le redressement de la France ».
Attitude suicidaire
Une position que partage l’ancien général de gendarmerie Bertrand Soubelet. Celui qui avait été tenté par Macron au moment de la campagne des présidentielles avant de faire marche arrière a un avis tranché sur la question : « Vouloir ou essayer de « recomposer la droite » est un objectif qui n’en est pas un et une idée dénuée de sens. C’est même une attitude suicidaire qui correspond à un logiciel ancien » explique-t-il (Le figaro du 26 septembre) avant d’ajouter sentencieusement : « Il n’y a pire chimère que de vouloir faire du neuf avec du vieux ».
Comment reconstruire sur un tel champ de ruines politique ? « Ne pas s’enfermer dans un discours uniquement tourné vers le passé, recroquevillé sur une vision paranoïaque du monde » recommande Robert Ménard. Prudent, le maire de Béziers qui a lancé en 2016 le mouvement « Oz’ ta droite » estime (Boulevard Voltaire du 24 septembre) qu’il « est trop tôt pour savoir qui portera nos couleurs, les couleurs d’une droite de bon sens, d’une droite soucieuse du bien commun…d’une droite qui sache rassembler, qui ne fasse plus peur… ». L’avenir de la droite il le voit dans « un grand mouvement conservateur. Conservateur sur les questions de société… conservateur sur les questions économiques… conservateur sur les questions d’environnement…».
Echecs successifs
Repartir à zéro pour tout reconstruire. C’est ce que prétend vouloir faire Marine Le Pen lors du congrès refondateur du parti en mars 2018. La ligne du FN va-t-elle évoluer vers une stratégie de « l’Union des droites » ? Elle voudrait tant le croire Emmanuelle Ménard, député (apparenté FN de l’Hérault) qui se désespère des échecs successifs du camp des patriotes : « Tant qu’on ne s’alliera pas les uns et les autres sur un programme et des idées communes qui sont des idées de droite, même s’il peut y avoir des variables d’ajustement, on ne gagnera pas ! ».
Reste à savoir si Marine Le Pen aura gagné en souplesse à la suite du congrès ? C’est pour avoir plaidé en faveur d’un rapprochement avec certains responsables politiques de droite comme Laurent Vauquiez ou Thierry Mariani que Marion Maréchal-Le Pen a été vertement tancée par sa tante et qu’elle s’est retirée (provisoirement ?) de la vie politique. Il semble que la présidente du Front national -est-ce une conséquence de la démission de Florian Philippot?- soit en train d’évoluer. Elle ne voit plus le FN comme un parti d’opposition, mais comme une possible « alternance » au pouvoir en place.